mercredi 1 février 2012

Stase

Marie-Pierre Dieterlé :
Velichka
À quoi jouent tous ces gens ?
À quoi jouons-nous ?
Tous plus sérieux les uns que les autres.

Marcher. Vite.
Serrer son sac. Fort.
Parler. Haut.
Écouter. Si peu.

Alors s’imposent la stase
le vide
le silence
l’accueil.

Alors se dévoile ce que l’on s’appliquait à ignorer :
la porosité
absolue et totale.

C’est parce que les courants d’air nous traversent
que nous nous rêvons hermétiques ;
parce que nous arpentons tous les mêmes couloirs
que nous nous focalisons sur nos pieds ;
parce que nous sommes si étroitement entremêlés
que nous érigeons tous ces murs imaginaires entre nous.

L’estomac du pauvre se tord dans nos talons
alors nous le méprisons ;
le cri du fou sort de nos bouches
alors nous le condamnons ;
la main du criminel pend au bout de nos bras
alors il nous faut le haïr,
oublier que nous partageons les mêmes nerfs.

Ça fait peur ?
Oui. Bien sur.
Mais la peur n’est pas une raison.


Arvo Pärt : Für Alina.

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6 commentaires:

  1. Beau texte. Bonjour Luca, de nouveau sur ton blog? Tu nous manquais...
    Bises
    Bettina

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  2. La peur est le moteur de notre esclavage, elle fait partie du programme, mais il n'est pas facile d'y échapper, même quand on met le doigt sur son irrationalité.
    Il faut profiter du temps libre pour la traquer, dédaigner les jeux du cirque, défier les oracles fonctionnaires du désastre, et enfin trouver la mère de toutes les autres peurs : la peur d'être seul, celle du petit humain méthodiquement abandonné, séquestré, sevré : une violence orchestrée dès le premier jour de la vie par nos kapos.

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  3. @ Bettina. Quelques mots qui passaient. Parfois je me manque aussi. Un peu. ;)

    @ Pépéhème. Merci pour ce joli passage.

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  4. Sans porosité, sans immobilisme, laisser la peur au vestiaire et entrer dans l'arène.
    Intéressant de te (re)lire.
    Merci pour ton article.
    Alizé-Garance

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  5. Ton passage dans ces lieux me touche énormément, Alizé-Garance. ;)
    J'espère que tu vas bien et que ta plume, tes crayons et tes pinceaux sont toujours aussi inspirés.

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  6. Je n'étais pas revenue sur ton blog, Luca.
    J'ai fait éditer un deuxième recueil que j'ai illustré... depuis, je constate un net fléchissement de mon inspiration, sans doute lié au refus de me répéter et à mon attente d'un nouveau printemps
    poétique !
    J'aime lire ta plume, car je recherche les surprises... Tes mots bousculent toujours et c'est nécessaire !
    Alizé-Garance

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